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Me souvenant du Père Oleg Kirilov

Octobre 18, 2016

Par Yuri Sokolovski : Un hommage commémoratif au Père Oleg Kirilov, ancien recteur de l’église Sobor Christ-Sauveur de Toronto qui est décédé le 18 octobre à Moscou.

Le 20 septembre 1945 est né un garçon dans une famille d’émigrés russes qui survivaient à peine dans la ville de Berlin-Ouest de l’après-guerre alors occupée. Ce jour-là, comme l’Église orthodoxe russe commémorait le saint prince Oleg de Briansk, le nouveau-né a reçu le nom d’Oleg.

Vingt ans plus tard...

Un jour qu’Oleg Kirilov passait sur sa motocyclette devant une église orthodoxe russe de Berlin-Ouest, il a soudain ressenti un grand désir d’arrêter la moto. Qu’est-ce qui l’a obligé à s’arrêter? Nous ne pouvons que l’imaginer. Peut-être s’agissait-il d’une douleur au plus profond de son cœur ou bien peut-être a-t-il été attiré par la beauté de l’église : nous ne le saurons jamais. Nous ne pouvons que supposer ce qui se passait dans l’esprit d’un jeune homme doué dont la vie aurait été très réussie dans l’un des pays occidentaux qui connaissaient à l’époque une croissance rapide (ses parents voulaient qu’il devienne avocat). Mais un jour ensoleillé, il s’est toutefois arrêté et est entré dans l’église. Et il n’a jamais regardé en arrière.

Sautons quelques années : jeune homme, Oleg Kirilov a obtenu un diplôme de l’Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge de Paris et a été ordonné au diaconat, puis à la prêtrise. Durant ses années de prêtrise, le Père Oleg a servi dans diverses paroisses orthodoxes russes d’Europe et du Canada.

Au début de la « perestroïka » et de la chute du « rideau de fer », le Père Oleg, déjà un prêtre d’expérience, a été envoyé à Moscou et, à partir de 1993, il a servi en tant que second prêtre à l’église Saint-Philippe-Métropolite-de-Moscou, à nouveau ouverte. Tout comme de nombreuses autres églises durant la période soviétique, l’église avait été négligée et convertie en entrepôt. L’édifice et tout ce qui se trouvait à l’intérieur nécessitaient un effort de restaurations majeures. Dès le début, le Père Oleg a activement commencé à prendre part à la restauration de l’église, de même qu’à la construction de la « maison d’accueil » sibérienne, injectant ses fonds personnels pour aider à la restauration de la belle église ancienne.

L’église Saint-Philippe est située près de la station de métro « Prospekt Mira » (Perspectives de paix, en français) du centre-ville de Moscou. En 1993, l’église venait tout juste d’être rouverte mais en dépit de constantes rénovations, elle était très confortable. Ma future épouse et moi avons donc décidé que nous voulions nous y marier.

J’ai rencontré le Père Oleg tout à fait par hasard. Ce jour-là, je suis passé à l’église après le travail pour faire des arrangements en vue de notre mariage et, au milieu des échafaudages de construction, le Père Oleg m’a offert de m’asseoir pour qu’il puisse prendre note de mes coordonnées dans son carnet. Il m’a patiemment donné des explications au sujet de la sainteté du mariage, de la nécessité du repentir et de la Sainte Communion. Ainsi a commencé notre cheminement, lequel devait être interrompu mais qui s’est miraculeusement rétabli quelques années plus tard.

Jusqu’à notre départ pour le Canada en 1998, nous avons été des paroissiens de l’église Saint-Philippe. C’est là que le Père Oleg a célébré les funérailles de mon beau-père et qu’il a baptisé Roman, notre premier fils.

Nos échanges se sont interrompus pendant plusieurs années en raison de notre déménagement à Toronto, où nous sommes devenus des paroissiens de la cathédrale orthodoxe russe Christ-Sauveur. En 2001, nous avons tout à coup appris qu’un nouveau prêtre allait venir de Moscou pour desservir la cathédrale en tant que recteur. À notre surprise, le nouveau recteur n’était nul autre que le Père Oleg Kirilov! Bien entendu, c’était par la providence de Dieu que nous nous trouvions à nouveau sous le toit d’un même temple.

Nous l’avons aidé à louer un appartement dans le secteur de Davisville (les immeubles à appartements lui rappelaient Medvedkovo, un secteur du nord de Moscou) où il a vécu toutes les années de son service à Toronto.

À la cathédrale Christ-Sauveur, le Père Oleg a immédiatement commencé à travailler activement à la croissance de la paroisse et de l’école paroissiale, imprimant et distribuant le journal « Orthodox Faith », faisant connaître l’église sur les canaux de la télévision russe, ainsi que dans les journaux russes de Toronto. Il a constamment rendu visite aux paroissiens âgés et a activement rencontré les immigrants de tous les coins de l’ancienne Union soviétique. Grâce à tous ces efforts, la paroisse a commencé à croître rapidement et le nombre d’étudiants de l’école russe s’est multiplié.

Le Père Oleg s’impliquait activement dans l’organisation des pèlerinages de l’école paroissiale à Ottawa pour rendre visite à l’archevêque de l’époque, Seraphim, de même qu’au monastère orthodoxe serbe près de Toronto.

Le Père Oleg a organisé une visite à l’icône miraculeuse de la Mère de Dieu de Pochaïev, ainsi qu’une visite aux reliques du saint prince Vladimir. Plus tard, il a commandé et fait les arrangements nécessaires à l’acquisition d’une copie de l’icône miraculeuse de la Mère de Dieu de Pochaïev.

Si vous vous retrouvez dans la cathédrale Christ-Sauveur de Toronto, regardez autour de vous. Plusieurs des éléments de cet édifice centenaire ont été rénovés grâce aux efforts du Père Oleg. Les nouveaux planchers de bois du temple, le tapis central, l’iconostase, l’icône de la Mère de Dieu de Pochaïev, les candélabres, les chandeliers, la salle à manger rénovée et plusieurs autres éléments portent l’empreinte de ses soins aimants pour le temple de Dieu. Durant ses dernières années de service, il a eu à cœur cette idée d’installer des dômes dorés qui avaient déjà été commandés et livrés à partir de la Russie. Malheureusement, pour diverses raisons, cette idée ne s’est pas matérialisée.

Je remercie Dieu de nous avoir donné, au Père Oleg et à moi, l’occasion de passer ces dix années ensemble sous le toit de la cathédrale Christ-Sauveur. Dans son temple, le Père Oleg a baptisé ma fille et mon fils cadet; c’est là qu’ils ont fréquenté l’école paroissiale, ont appris à lire et à écrire en russe, ont célébré la Nativité et la Pâque, pris part à des productions scolaires et se sont faits de nombreux amis.

Comme le Père Oleg nous a toujours enseigné que l’église devrait être au centre de notre vie, nous avons centré notre vie autour de l’église et non ajusté notre vie ecclésiale à nos besoins. Il nous a enseigné à venir à l’église tous les dimanches et à adopter un comportement sérieux en ce qui a trait aux sacrements de l’Église.

Le Père Oleg avait un sens de l’humour remarquable, appréciant toujours une bonne blague, mais il demeurait un compagnon extrêmement délicat et attentif. Il parlait plusieurs langues européennes et était très instruit. Le Père Oleg pouvait toujours trouver un terrain d’entente avec des audiences très différentes : du patriarche de Moscou au paroissien âgé, du magnat nouveau riche au mécanicien.

Après avoir pris sa retraite en 2011, il est retourné à sa ville de Moscou bien-aimée. Il a résidé dans son appartement de Moscou situé près de la station de métro Alekseevskaya, pas très loin de l’église Saint-Philippe. Communiquer avec lui est devenu à nouveau difficile, mais nous avons essayé de garder contact et de lui téléphoner régulièrement. À Moscou, le Père Oleg a continué de célébrer occasionnellement à l’église Saint-Philippe.

Il m’a souvent dit que son tour venait et il me semblait évident qu’il s’y préparait. Et la semaine dernière, en sa 72e année de vie terrestre, est arrivé le moment final auquel se préparait le Père Oleg pendant toutes ces années.

Il a eu une bonne vie et a laissé derrière lui un bon héritage. Que Dieu lui accorde le repos dans le Royaume des Cieux et que notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ lui accorde le pardon et la rémission de ses péchés.

Mémoire éternelle!

Yuri Sokolovski